Église apostolique arménienne Surp Hagop
Eglise Arménienne
Surp Hagop
64, Route de Troinex
1256 Troinex
Type de construction: | église arménienne |
Superficie bâtie: | 163 m2 |
Hauteur du bâtiment: | 17,10 m |
Coût: | 2'600'000 SFr. |
Opposition: | aucun |
Maître d'ouvrage: | Fondation St-Grégoire L'Illuminateur |
Architectes: | Frédéric Gautier et Eduard Utudjian |
Pose de la première pierre: | 1967 |
Période de construction: | 14 mois |
Inauguration: | 14 septembre 1969 |
Tradition religieuse: | église apostolique arménienne |
Du début du projet jusqu'à l'inauguration: | environ 9 ans |
Nous prenons le bus 45 en direction de Troinex, dans les faubourgs de Genève. De la halte de bus «Les Crêts», nous marchons sur la route de Troinex, direction centre de Genève. Des arbres aux splendides fleurs roses claires entourent une église gracieuse, éclatante de blancheur par ce jour d'été ensoleillé et pourvue d'une tour à 16 faces, relativement basse mais cependant volumineuse. La tour se dresse au centre de la construction aux fondations cruciformes. Au sommet de son toit plissé, on aperçoit une croix gris clair aux quatre extrémités partiellement entaillées. Quel style architectural peut bien se cacher derrière cette belle église?
Nous nous tenons devant le signe le plus tangible de la présence arménienne en Suisse: l'église Surp Hagop, en français Saint-Jacques. Elle fut édifiée dans le style arménien classique. Comme modèle, on prit l'église de Sainte-Haripsime, construite au VIème siècle à Etschmiadsin à l'ouest d'Erevan. Pour la façade de Troinex, on choisit même du tuf, pierre volcanique utilisée traditionnellement. Le docteur Abel Manoukian, prêtre de la communauté arménienne explique: «C'est très courant, on désirait ainsi se rapprocher de la patrie et de l'architecture arménienne.»
A droite, sur le parvis de l'église, un mémorial en souvenir du génocide du peuple arménien a été érigé. Derrière l'église, se dresse le centre arménien de Genève. Il s'agit d'un bâtiment cubique de couleur rouge-terre qui s'inscrit bien dans le paysage agricole.
Abel Manoukian raconte: «Notre communauté a plus d'une centaine d'années d'histoire en Suisse.» A la fin du XIXème siècle, ce sont en particulier des étudiants russes ou turcs qui vinrent faire leurs études en Suisse. Après le génocide arménien perpétré à l'Est de l'empire ottoman, on fonda le 21 juin 1921 le «Foyer Arménien» qui fut, en 1922, déplacé de Begnins à Genève.
Dès 1925, les Arméniens célébrèrent leurs premières liturgies dans une salle à Genève. Un petit Conseil ecclésiastique, sous la direction de Setrak Papazian, organisa la sainte messe qui ne fut, cependant, célébrée au départ qu'à Noël et à Pâques. A cet effet, on construisit un autel transportable.
Après la deuxième guerre mondiale, des Arméniens du Liban, d'Iran, de Turquie et de Syrie cherchèrent refuge en Suisse. A cette époque, la communauté arménienne de Suisse comptait 300 personnes. Avec le temps, le désir d'avoir sa propre église se mit à croître. C'est en 1960 que le projet de construction d'une nouvelle église fut élaboré. Le riche commerçant Hagop Topalian (1897-1985), qui vivait alors en Italie, mit cette même année environ 480'000 francs à disposition pour la construction de l'église et ce en mémoire de ses parents. Il mettait pour conditions que les Arméniens de Suisse financent l'achat du terrain, l'aménagement intérieur et l'entretien de l'église. En 1967, on commença la construction du bâtiment religieux sous la direction du catholicos Vazken I et l'église fut inaugurée le 14 septembre 1969 par l'archevêque de Paris, Serovpé Manoukian.
Le docteur Abel Manoukian est né en 1959 à Beyrouth et a étudié la théologie en Arménie et à Vienne. En 1995 il devient prêtre de la communauté arménienne de Suisse. Il est également président du Conseil administratif de la paroisse, travail consacré principalement aux questions financières. Manoukian dit au sujet de son activité: «Ma mission est principalement morale et spirituelle.»
Le prêtre Manoukian affirme que la communauté arménienne de Suisse est bien intégrée: «Imaginez, lorsqu'une communauté a une histoire vieille de cent ans, la plupart de ses membres sont nés ici, ont grandi ici et sont allés à l'école.» Manoukian décrit le rapport avec le voisinage comme «très bon». Il en serait de même de la relation avec les églises réformées, évangéliques et catholiques. Parfois, les voisins viennent également dans l'église: «Nous ne disons jamais que l'église arménienne n'est que pour les Arméniens. Si vous désirez prier dans l'église ou bien si nous célébrons une fête et que vous désirez y participer, vous êtes libre de le faire.»
L'église arménienne est une des plus anciennes confessions chrétiennes. Tout comme l'église copte, également très ancienne, elle n'appartient pas, au sens strict, à la famille des églises orthodoxes. Elle est parfois nommée église apostolique arménienne car la tradition veut que les disciples du Christ, Bartholomée et Thaddée, aient les premiers apporté le christianisme dans les hauts plateaux montagneux autour du mont Ararat. Il est certain qu'autour de l'an 300, le roi Trdat (Tiridates) III se laissa baptiser par l'apôtre arménien Grégoire, l'«Illuminateur», et qu'ainsi le christianisme devint, pour la première fois, religion d'état dans un pays. Peu après, Grégoire fut choisi par le roi, les nobles et l'armée comme catholicos, dirigeant de l'église arménienne. C'est pour cette raison que l'église est parfois également appelée arménienne grégorienne.
L'église arménienne est étroitement liée à la conscience nationale des Arméniens: seuls les Arméniens peuvent en faire partie. Au Vème siècle, elle était largement répandue au-delà de l'espace qui constitue aujourd'hui l'état arménien, en particulier dans la région de l'est de la Turquie. La situation politique influença constamment l'église. Avec les massacres de 1895 et le génocide de 1915-18, la culture arménienne dans la région est de la Turquie actuelle s'éteignit pratiquement totalement. Dans les vallées des montagnes éloignées, églises tombent en ruines.
Comme les coptes et les «jacobites» de l'église syriaque-orthodoxe, les Arméniens n'acceptèrent pas les décisions du concile de Chalcédoine (451) et conservèrent leur croyance selon laquelle la personne du Christ était uniquement divine et non également humaine comme le pensait l'église byzantine. Dès 400 après Jésus-Christ le moine Mesrop développa un alphabet arménien. C'est avec cet alphabet qu'une traduction de la bible en arménien fut rédigée par Mesrop et le catholicos Sahak ainsi qu'une riche littérature au cours des siècles suivants.
L'église arménienne compte aussi bien des prêtres célibataires, appelés Vardapet («maître») et parmi lesquels on choisit habituellement les évêques, que des prêtres mariés au service de la communauté. La liturgie est célébrée en vieil arménien du Vème siècle et permet - au contraire des églises orthodoxes − l'utilisation de l'orgue ou de l'harmonium. L'année ecclésiastique dépend du calendrier julien. La naissance de Jésus est fêtée le jour de l'épiphanie (6 janvier).
La structure interne de l'église arménienne est complexe. Ainsi, le siège des catholicos fut déplacé plusieurs fois. Depuis 1441, il est à Etschmiadsin en Arménie, environ vingt kilomètres à l'ouest d'Erevan, la capitale. Un deuxième catholicos, résidant à Antélias au Liban, a l'autorité sur les 600'000 croyants vivant à l'est de la Méditerranée. A Istanbul comme à Jérusalem, des patriarcats plus petits, mais également indépendants, existent. Suite aux contacts durant les croisades, on en vint au XII-XIIIème siècles à l'union passagère avec l'église catholique romaine. L'église arménienne-catholique, unie aujourd'hui avec Rome, date cependant seulement de 1740 et comprend environ 100'000 membres.
L'église apostolique arménienne compte environ 3'200'000 membres en Arménie, un million dans les différents pays du Proche-Orient et environ un demi million dans la diaspora, principalement en Occident (surtout aux USA). Depuis 1999, c'est Karekin II Nersissian qui exerce la fonction de «patriarche suprême et catholicos de tous les Arméniens».
La communauté arménienne en Suisse porte le nom de Surp Hagop, Saint-Jacques. Elle dépend du délégué du patriarcat pour l'Europe occidentale dont le siège est à Paris. Elle compte aujourd'hui environ 5'000 membres.